Amélioration de la relation avec les fournisseurs et maîtrise des risques prennent de l’importance dans la démarche achats responsables : c’est l’une des tendances détectées par le baromètre annuel de l’Obsar, publié le 2 février 2021. Le respect des valeurs sociales est aussi un objectif montant qui incite les entreprises à développer leur démarche. Ces nouvelles motivations viennent remplacer celles liées à la conformité et à la protection de l’image de l’entreprise, se félicite l’Observatoire des achats responsables.
Certaines entreprises ont mis en place des mesures de soutien à leurs fournisseurs pendant la pandémie. AFD
« Le risque et la conformité ne sont plus seuls en tête des motivations pour mettre en œuvre une approche plus responsable des achats », se félicite Fanny Bénard, vice-présidente de l’Obsar, lors de la présentation du baromètre annuel des achats responsables le 2 février 2021. En effet, cette année, l’amélioration de la relation avec les fournisseurs et la maîtrise des risques sont considérées par 23 % des répondants (1) « d’égale priorité » avec les raisons habituelles pour déployer les achats responsables, qui sont la mise en conformité et la contribution aux engagements RSE de l’organisation.
ENGAGEMENT MALGRÉ LA CRISE
L’édition 2021 du baromètre apporte un éclairage sur l’intérêt des organisations pour les achats responsables, qu’elles soient publiques ou privées, dans ce contexte particulier marqué par la Covid-19.
La tendance montre un déploiement de la démarche dans de plus en plus d’organisations. Cela concerne notamment les PME, dont 35 % ont une démarche depuis moins de deux ans et qui désignent à 57 % les achats responsables comme une priorité.
MESURES DE SOUTIEN AUX FOURNISSEURS
« Dans le contexte actuel, la relation fournisseur est un enjeu primordial, pour les donneurs d’ordre comme pour les fournisseurs eux-mêmes », souligne Fanny Bénard.
Des actions de soutien ont été mises en place avec les fournisseurs pour faire face aux difficultés liées à la pandémie lors du premier confinement, note l’Obsar, avec 55 % des répondants toutes catégories qui ont prolongé les contrats et 56 % qui ont accordé des avances de trésorerie ou raccourci les délais de paiement vis-à-vis de leurs fournisseurs. D’ailleurs, la mise en place de délais de paiement inférieurs à 30 jours en 2020 connaît une hausse par rapport à l’an passé (+6 %) et atteint 25 % des répondants.
« Cela ne veut pas dire que tous les comportements envers les fournisseurs ont été exemplaires », nuance Annie Sorel, vice-présidente de l’Obsar. « Certaines entreprises n’ont pas honoré leurs commandes ou ont changé de fournisseurs. » On observe aussi un doublement des retards de paiement par rapport aux obligations légales (10 % par rapport à 5 % l’an passé). « Mais on voit aussi que certaines ont amélioré leur dialogue avec leurs fournisseurs et ont créé des liens qui vont perdurer. Cette période aura changé la façon de travailler avec les fournisseurs. »
UNE PRATIQUE RENTABLE
Pour Pierre Pelouzet, président de l’Obsar, le classement par importance des objectifs d’achats responsables pour les prochaines années « recèle de bonnes surprises dont le fait que le respect des valeurs sociales arrive en bonne position, avec la réduction des risques. Parallèlement, l’objectif de la protection de l’image est en retrait ».
Parmi les difficultés identifiées pour mettre en place une démarche d’achats responsables, la première reste « la capacité à mesurer la performance des achats responsables ». Viennent ensuite le fait que cela entre en contradiction avec d’autres objectifs, que cela pose des contraintes budgétaires, et qu’il existe parfois un manque d’expertise. Néanmoins, Annie Sorel constate que « les acheteurs ont pris conscience que cela ne coûte pas plus cher, et qu’ils ont tout à y gagner, notamment avec de meilleures notes extrafinancières et un intérêt des investisseurs ».
Le baromètre montre que la responsabilité sociale et la protection de l’environnement sont toujours deux composantes fondamentales des achats responsables. Elles sont suivies par la lutte contre la corruption pour les grandes entreprises, la maîtrise durable des coûts pour les PME et l’accès des PME aux marchés pour le secteur public. Pour l’Obsar, cela reflète l’actualité réglementaire (lois Sapin II, transition énergétique, Agec) et la crise économique de 2020.
L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE PAS PRIORISÉE
Côté environnement, les acheteurs jugent la réduction des déchets, des pollutions et des consommations prioritaires. « La réduction des gaz à effet de serre, classée en quatrième position, pâtit très certainement d’une difficulté de mise en œuvre au travers des achats. L’économie circulaire [hors réduction des déchets], en dernière position, pourrait faire penser à une moindre appréhension de ce que recouvre ce sujet, pourtant porteur de performance environnementale, analyse l’Obsar, qui compte poursuivre son programme achats circulaires et solidaires en 2021.
En ce qui concerne les critères sociaux, la santé et la sécurité des personnes et les conditions de travail arrivent en tête. « Certains de ces enjeux sont des conséquences directes de la crise sanitaire. Et les donneurs d’ordres peuvent y contribuer directement comme l’ont confirmé les organisations vis-à-vis de leurs fournisseurs en les aidant concrètement par la fourniture de masques et gel », note l’Obsar.
FAIBLESSES DE CARTOGRAPHIES DES RISQUES
L’observatoire pointe une « incohérence » au niveau du respect des droits de l’homme : alors que c’est une valeur partagée par tous, les acheteurs accordent un moindre niveau d’importance à la traçabilité de la chaîne d’approvisionnement et à la relocalisation. « Ces deux sujets ne sont pas analysés sous le prisme des achats responsables », regrette-t-il. Le baromètre fait aussi ressortit une faiblesse de la formalisation des enjeux de RSE liés à leurs achats, notamment chez les PME : 33 % seulement publient une cartographie des risques (contre 70 % pour les grandes entreprises) et 31 % des engagements publics et chiffrés (contre 62 % pour les grandes entreprises). Même chez les grandes entreprises, soumises au devoir de vigilance, près de 60 % ont une cartographie sur une seule dimension, « ce qui rend la démarche insuffisamment robuste », selon l’Obsar, qui rappelle qu’on devrait y retrouver les dimensions sectorielles, géographiques et relatives aux enjeux.
Pour aller vers une meilleure formalisation, l’organisation promeut la norme ISO 20400 sur les achats responsables, qui existe depuis quatre ans. « Ce qui est important dans une norme internationale, c’est qu’elle représente un langage commun pour toutes les parties prenantes de la supply chain dans le monde entier et c’est par ce langage commun que nous pourrons faciliter la mise en place de démarches plus responsables pour l’ensemble de la communauté des acheteurs. » Aujourd’hui, elle est connue par 57 % des répondants. La moitié d’entre eux s’en servent pour se préparer au label relations fournisseurs et achats responsables.